"Surtout pas d "Obao", 'y a rien de pire pour bousiller la peau!".
- "Je prends que du savon de Marseille!".
- "Tous les savons liquides c'est de la ...!".
- "Le savon de Marseille; ...y a qu'ça de vrai!".
...
J'étais sous la douche et l'eau tiède me faisait du bien.
Je venais de nager 2000 mètres dans cette foutu piscine pleine de chlore -celle de "Château-Landon", et j'avais bien mériter cette douche salutaire. Je fermais les yeux, la pomme de douche fonctionnait à merveille: une légère pression sur le pommeau et de tout là-haut l'eau me tombait dessus, une eau tiède et chaleureuse; un vrai miracle.
"Dieu existe" me disais-je!
Elles avaient peut-être 60 ans. Pas loin en tout cas! Elles dissertaient sur le savon de Marseille et sur les savons liquides, elles confrontaient leurs avis, leurs opinions, comparait la vertu des uns des autres, l'une était à ma droite, l'autre à ma gauche, elles avaient l'air d'en connaître un rayon sur les savons: à les en croire, "Obao", c'était le pire!
Leurs seins avaient "poussé" vers le bas, leurs ventres n"étaient plus d'une parfaite tenue mais bon, leurs enfants (surement) avaient grandi et s'étaient éloignés, leurs cheveux n'étaient plus du meilleur éclat, leurs hanches leurs joues leur peau etc. bref, tout ça, quand ça veut plus trop tenir eh bien ça ne tient plus, l'esprit à beau faire, la chair fait ce qu'il lui plait, elle ne suit pas les méandres de l'esprit, et quand la chair s'affaisse, elle s'affaisse, mais leurs yeux étaient encore pleins des rêves de leur jeunesse; dans ces cas là seules les yeux ou le sourire peuvent vous sauver du désastre: toutes deux avaient un beau sourire!
L'eau qui me tombait dessus était comme une preuve de l'existence de Dieu, je ne m'y connaissais aucunement en matière de savon -pour moi un savon en valait un autre! mais question bienfaits j'en connaissais un minimum: ce qui m'arrosait était tout simplement délicieux; et je n'avais d'autre choix que de les écouter. Je fermais les yeux et me laissait arroser par cette eau bienfaisante et parfois j'en ouvrais un pour lorgner mes voisines qui n'en finissaient pas de disserter sur le savon et, vraiment, je n'avais d'autre choix que de les écouter: aurais-je voulu qu'il en soit autrement que cela ne m'aurait nullement été possible, j'avais l'impression de ne pas exister, elle parlait "au-dessus de mon épaule". Comme si d'épaule je n'en avais pas, pas même une! Elles étaient seules, entre elles, Dieu existait mais moi !!!
-"J'ai lu un article sur le savon de Marseille dans "Marie-Claire"...".
Après la douche, je suis allé dans ma cabine pour me changer. Je me suis retrouvé entre elles. A nouveau! L'une occupait la cabine qui se trouvait à ma droite, l'autre la cabine qui se trouvait à ma gauche.
J'étais comme un arbitre.
Au milieu!
- "J'ai horreur des collants et de tous ces trucs qu'il faut passer en dessous des robes ou des jupes c'est pour ça que je mets jamais de jupes ou de robes en hiver. Que des pantalons!".
- "T'as raison, moi j'en mets que lorsque je vais à un entretien d'embauche. ...Ça fait quand même trois ans que je suis au chômage! Pour l'instant cela ne m'a pas servi à rien d'enfiler des jupes ou des robes. "Ils" veulent tous des jeunettes qui sourient et dont les formes ....tu vois ce que je veux dire! C'est un peu pour ça que je me suis inscrit à "l'aquagym"; pour rester en forme!".
- "Moi, c'est pour mon mari, ça le rassure!".
...
- "En tout cas, JAMAIS "d'Obao"!
- "...Du savon de Marseille!!!!".
Etc.
Je me suis changé. J'ai enlevé mon maillot de bain et j'ai remis mon slip, mes chaussettes, mon jean; le reste!
En silence!
Puis j'ai quitté la piscine.
Je suis allé "chez l'arabe du coin". D'habitude, j'y achetais deux cannettes de "Kro". Là, je ne sais pas ce qu'il m'a pris: j'en ai acheté trois; et un savon de Marseille!
Ps. "Qui va piano va etc.".